
Sophie Bridier
01.08.2025
Les questions de nos clients et les réponses de nos expert·es sur la CSRD !
Au fil de nos accompagnements, nos clients posent des questions à nos expert·es sur les sujets ESG.
Voici 10 questions que l'on nous a posées sur la CSRD depuis le début de l'année 2025.
Découvrez leurs réponses détaillées de nos expertes juridiques, rédigées par Sophie BRIDIER, juriste et rédactrice en cheffe ESG chez Lefebvre Dalloz,
Le Conseil de l’UE a validé sa « position de négociation » le 25 juin dernier. Autrement dit, les représentants des États membres ont trouvé un accord sur les modifications qu’ils souhaitent apporter au texte proposé par la Commission européenne au mois de février. Ils défendent notamment un relèvement des seuils à partir desquels les entreprises pourraient se voir imposer la présentation d’un rapport de durabilité en 2028 (société ayant plus de 1000 salariés et réalisant plus de 450 millions de chiffre d’affaires). Cependant les représentants des États membres ne sont pas seuls à décider sur ce dossier. Ils devront trouver un compromis avec la majorité des députés européens. De leur côté, les débats sur le texte omnibus ont commencé et se clôtureront en octobre. C’est donc à l’automne que nous connaîtrons la « position de négociation » des eurodéputés. Le débat législatif pourra alors réellement commencer. A ce jour, les sociétés qui auront a présenté leur premier rapport de durabilité en 2028 sont celles de la vague 2 (grandes entreprises ou société mère de grandes entreprises dépassant au moins deux des seuils suivants : 250 salariés ; 25 millions de bilan (total) ; 50 millions de CA).
La nouvelle loi datée du 30 avril (dite loi Ddadue) prévoit désormais qu’une seule déclaration est à produire : celle à réaliser dans le cadre de l’état de durabilité (pour les entreprises qui y sont contraintes selon les articles L 232-6-3 et L 233-28-4 du code de commerce) à inclure dans le rapport de gestion. Si cet état contient une déclaration des émissions de GES de l’entreprise (ou du groupe) et un plan de transition, alors il n’est plus nécessaire de présenter un bilan des émissions de GES (selon l’article L 229-25 du code de l’environnement).
Au cours de l’une des consultations du CSE (celle dédiée aux orientations stratégiques de l’entreprise ou celle sur la situation économique et financière ou sur la politique sociale de l’entreprise, des conditions de travail et de l’emploi), le CSE doit être consulté sur l’information de durabilité de la société. Et cela au choix de l’employeur ; c’est une clarification introduite par la loi du 30 avril (dite loi Ddadue).
Selon la rédaction de Lefebvre Dalloz, « la logique voudrait que le thème de la durabilité soit examiné lors de la consultation sur la situation économique et financière. Selon les dispositions supplétives du code du travail (s’appliquant en l’absence d’accord d’adaptation sur les consultations récurrentes du CSE), c’est en effet dans ce cadre que doit être transmis au CSE le rapport de gestion qui inclut, le cas échéant, les informations de durabilité et le rapport de certification des informations en matière de durabilité (C. trav., art. L. 2312-25, II, 2). Mais il est tout à fait possible, comme le permet désormais explicitement l’article L 2312-17 du code du travail, d’organiser la consultation sur la durabilité lors d’une autre consultation récurrente ».
Pour rappel, le standard VSME a été transmis par l’EFRAG à la Commission européenne au mois de janvier 2025. L’exécutif européen recommande désormais l’utilisation de ce standard élaboré pour les PME non concernées par le reporting de durabilité conformément à la directive CSRD. Le standard, comme son nom l’indique, est volontaire. Aussi, il n’impose pas d’obligation de présenter de reporting de durabilité selon un calendrier défini et, par là même, de faire part de ses émissions de GES. Toutefois, le droit national peut l’imposer à certaines entreprises. Chez Toovalu, nous recommandons cependant de mettre à jour tous les ans le bilan de GES lorsque celui-ci est réalisé à la demande des financeurs.
La norme VSME contient un module de base et un module complet, sur lequel l’entreprise peut décider de s’appuyer ou non. Concernant le module de base, le point de données B3 concerne les émissions de gaz à effet de serre. Il recommande de présenter :
Le module complet, qui présente d’autres points de données, peut être utilisé notamment pour répondre à des demandes d’information provenant d’entreprises de sa chaîne de valeur. Il contient également des développements sur la manière de présenter et de calculer ses émissions du scope 3 (méthode du GHG Protocol Corporate Value Chain (Scope 3)). Cela reste entièrement à la discrétion de l’entreprise.
Le règlement européen 2020/852 du 18 juin 2020 (règlement « taxonomie ») a mis en place un système de classification des activités économiques durables sur le plan environnemental et impose à certaines sociétés de publier des indicateurs clés de performance (ICP) et des informations narratives concernant ces activités. L’obligation de préparer des informations en application du règlement taxonomie s’applique à toute société soumise à l’obligation de publier des informations de durabilité. Ainsi, dès lors que le paquet omnibus modifie le nombre d’entreprises se trouvant dans l’obligation de présenter un tel rapport, il en ira de même pour les informations liées à la taxonomie verte. Ces informations doivent, en tout état de cause, figurer dans la déclaration de durabilité. Les entreprises des vagues 2 (toutes les grandes entreprises et sociétés mères de grands groupes cotées ou non) et 3 (PME cotées sur un marché réglementé – Établissements de crédit de petite taille et non complexes – Entreprises captives d’assurances et de réassurance) n’ont pas à présenter d’information en matière de taxonomie avant 2028 au plus tôt.
Les auditeurs devront faire respecter la règle suivante : les entreprises soumises au reporting de durabilité ne pourront pas demander à celles non concernées - au sein de leur chaîne de valeur - de leur faire remonter de l’information au-delà de ce que prévoira le futur standard sur le reporting volontaire. La certification des rapports devra en tenir compte. Seule une assurance limitée de l’information de durabilité sera exigée de la part des auditeurs. La Commission européenne souhaite l’abandon du principe de l’assurance raisonnable. L’assurance portera toujours sur : le respect de l’obligation de reporting, le respect des ESRS simplifiés et le processus mis en œuvre par l’entreprise pour respecter ces standards.
Les entreprises qui n’entrent pas dans le champ d’application du reporting de durabilité n’ont pas d’obligation légale de publier des données en la matière. Toutefois, elles peuvent vouloir le faire à titre volontaire. Elles peuvent aussi recevoir des demandes en la matière provenant de leurs donneurs d’ordres, présents dans leur chaîne de valeur et soumis au reporting de durabilité. Dans ce cas, quel standard utiliser ? L’EFRAG recommande d’utiliser la norme volontaire rédigée pour les PME non cotées (dénommée VSME ; voir notamment les points 1 à 4). « La norme VSME se limite à des indicateurs de base et agnostiques. (…) Les PME ayant des activités ou des relations commerciales à haut risque doivent être prêtes à fournir des informations supplémentaires, courantes dans le secteur, afin d'aider leurs clients plus importants à comprendre s'ils sont exposés à des risques accrus d'impacts graves », recommande Filip Gregor, membre du SRB de l’EFRAG.
Il est inscrit dans le droit de l’UE la possibilité d’invoquer le « secret des affaires » pour ne pas tout dévoiler. Les standards européens sur le reporting de durabilité précisent notamment que l’entreprise « n’est pas tenue de publier des informations classifiées ou sensibles, même si ces informations sont considérées comme matérielles » (ESRS1, paragraphe 7.7). Lorsqu’elle l’entreprise « publie des informations sur sa stratégie, ses plans et ses actions, si une information particulière relative à la propriété intellectuelle, au savoir-faire ou à des résultats d’innovations peut servir à réaliser l’objectif d’une exigence de publication, l’entreprise peut néanmoins omettre cette information particulière », poursuit l’ESRS1. Dans ce cas, trois conditions sont énoncées par l’ESRS1 :
Dans une optique de préservation du secret des affaires, la loi Ddadue d’avril 2025 prévoit la faculté d’omettre, dans la version du rapport de gestion à déposer au greffe, certaines informations de durabilité. Le texte encadre cependant cette prérogative.
En effet, il est préalablement nécessaire d’établir un avis dûment motivé du conseil, du directoire ou du gérant justifiant que la publication de certaines informations en matière de durabilité est de nature à nuire gravement à la position commerciale de la société. En outre, il est impératif que cette omission ne fasse pas obstacle à la compréhension juste et équilibrée de la situation de la société et des incidences de son activité, et que ces informations soient transmises à l’Autorité des marchés financiers (selon l’article L 232-23 du code de commerce).
Vous n’encourez pas de sanction juridique a proprement parler dans ce cas. En France, à partir de janvier 2026, une société qui n’aurait pas publié de rapport de durabilité, pourrait être exclue d’une procédure de passation des marchés publics ou des contrats de concession (selon l’article L 2141-7-1 du code de la commande publique). La loi Ddadue a supprimé toute sanction pénale en cas de non-respect, par les entreprises concernées, de leurs obligations de faire certifier leurs informations de durabilité.
Tout dépend de l’activité de votre entreprise ou du groupe pour lequel vous effectuez le reporting de durabilité et si vous vous faites accompagner ou non. Une analyse complète de double matérialité prend du temps et demande de mobiliser des ressources (internes et externes, dont vos parties prenantes). Il faut s’y atteler durant plusieurs mois. Les lignes directrices de l’EFRAG sur la double matérialité identifient - au moins - quatre étapes à suivre :