CSRD : le rapport de durabilité est finalement édulcoré au niveau de l’UE

Nouveaux seuils, calendrier 2028 et allègement des obligations pour les entreprises

CSRD : le rapport de durabilité est finalement édulcoré au niveau de l’UE

Le 16 décembre, l’adoption en plénière au Parlement européen du compromis trouvé en trilogue, le mardi précédent, marque l’accord des co-législateurs et ouvre la voie à une refonte profonde du rapport de durabilité.

La partie est finie. A tout le moins au niveau de l’Union européenne. Le 16 décembre, la majorité des députés européens (principalement issus des rangs du PPE (droite) et du groupe ECR (extrême-droite), a adopté en première lecture le compromis, trouvé la semaine précédente en trilogue, avec des représentants des Etats membres et de la Commission européenne. C’est ce texte qui sera publié au Journal officiel de l’UE dans les prochains jours, puis transposé par les Etats membres.

Points clés CSRD Ce qu’il faut retenir
Champ d’application Obligation limitée aux entreprises > 450 M€ de CA net et > 1 000 salariés
Calendrier UE Une seule vague à partir de 2028 (rapport sur l’exercice 2027)
Holdings financières Option de non-publication du rapport consolidé sous conditions strictes
Clause de revoyure Réexamen possible des seuils d’ici avril 2031, avec option de régime simplifié
Groupes de pays tiers Reporting requis dès 2029 si CA UE > 450 M€ et filiale ou branche UE > 2 M€
Entreprises vague 1 Poursuite du reporting en 2026-2027 avec ESRS simplifiés (« Set 2 ») dès 2028
Exemptions anticipées Les États membres pourront exempter dès 2026 certaines sociétés cotées < 1 000 salariés
Value chain cap Limitation des informations exigibles auprès des PME de la chaîne de valeur
Entreprises protégées Sociétés < 1 000 salariés pouvant refuser des demandes excessives d’information
Audit et assurance Assurance limitée maintenue, pas d’assurance raisonnable prévue
Portail européen Création d’un portail UE avec lignes directrices, modèles et référentiels CSRD

Le champ d’application du rapport de durabilité

Une seule vague au sein de l’UE à partir de 2028

Seules les entreprises dont le chiffre d'affaires net dépasse 450 000 000 EUR et qui emploient en moyenne plus de 1 000 salariés au cours de l'exercice, au niveau du groupe (de façon consolidée) le cas échéant, devront produire un rapport de durabilité à compter de 2028 (rapport sur l’année financière 2027).

Cas des holdings

Une exception est prévue pour les holdings financières qui bénéficieront d’une option : celle de ne pas produire de rapport de durabilité consolidé. Cette option ne s'appliquera que lorsque l'entreprise mère répond à la définition d'une entreprise de participation financière qui ne s'implique pas directement ou indirectement dans la gestion des filiales (sans préjudice de ses droits en qualité d’actionnaire).

Vers des seuils plus bas post 2031 ?

Une clause de revoyure est toutefois prévue par le droit européen. D’ici le 30 avril 2031, la Commission européenne doit présenter un rapport portant sur la baisse des seuils désormais prévus, notamment pour tenir compte des meilleures pratiques et du niveau réel de préparation des entreprises à fournir des informations en matière de durabilité. Dans ce contexte, la Commission pourrait notamment examiner le besoin d’établir un régime de déclaration simplifié.

Rapport de durabilité incorporant une société mère de pays tiers

Les informations (limitées) concernant les entreprises de pays tiers sont toujours à insérer dans le rapport de durabilité à compter de 2029 (sur l’exercice 2028). Toutefois, les seuils ont été revus. Les informations concernant les sociétés mères de pays tiers à inclure dans le périmètre du rapport consolidé concernent celles :

  • qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 450 millions d’euros (net) au sein de l’UE ;
  • et qui ont une filiale ou une succursale au sein de l’UE réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 2 millions d’euros (net).

Une exception est également introduite au profit des sociétés mères de pays tiers qui sont des holdings financières. Elles pourraient ne pas produire de rapport consolidé de durabilité.

Qu'en est-il des entreprises de la vague 1 ?

Les entreprises qui doivent actuellement produire un rapport de durabilité (société cotées ayant plus de 500 salariés et réalisant plus de 50 millions d’euros de CA (net) et/ou 25 millions d’euros de bilan (total) et qui dépasseront les seuils présentés ci-dessus doivent poursuivre leur travaux de reporting en 2026 et 2027. D’ici la fin du mois de juin 2026, elles bénéficieront des standards européens simplifiés sur le reporting de durabilité (ou ESRS “set 2”) adoptés via un acte délégué. Ces standards seront à respecter pour l’élaboration des rapports 2028 (sur l’année financière 2027) et suivants. Les entreprises pourront choisir de s’y conformer à titre volontaire pour leur rapport 2027. La Commission européenne devrait également présenter des lignes directrices sectorielles pour illustrer et faciliter l'application des ESRS dans un secteur donné.

Concernant les entreprises qui doivent actuellement produire un rapport et qui n’auront plus à le faire à terme en 2028 (les sociétés cotées qui ont moins de 1000 salariés et qui réalisent moins de 450 millions de chiffre d’affaires (net)), les Etats membres vont pouvoir les exempter de la publication d’un tel état de durabilité dès 2026.

Principe de "value chain cap" pour la chaine de valeur

Quelles seront les informations susceptibles d’être demandées à sa chaîne de valeur ?

Le principe dit de « value chain cap » limite le nombre d’informations qu’une société soumise au reporting de durabilité peut recueillir auprès d’entreprises dites “protégées”. Les premières ne peuvent pas demander plus d’informations que celles identifiées au sein du futur standard mis en place sur le reporting réalisé à titre volontaire, sauf:

  • si ces informations sont échangées volontairement car communément partagées au sein d’un secteur d’activité, par exemple,
  • ou que la demande d’information intervient à titre légal (pour assurer le devoir de vigilance notamment).

Une disposition contractuelle contraire à ce principe devra être considérée comme nulle.

Droit des entreprises protégées

Les entreprises protégées ont donc le droit de refuser de fournir des informations allant au-delà de celles présentées dans la norme volontaire en réponse à une demande formulée par un donneur d’ordre. Elles peuvent s’auto-déclarées comme “entreprises protégées”. Elles bénéficieront du futur standard sur le reporting à titre volontaire qui sera adopté via un acte délégué de la Commission européenne au plus tard dans les 4 mois suivant l’entrée en vigueur du texte adopté ce mardi.

Qu’est ce qu’une entreprise protégée ?

Est une entreprise protégée celle:

  • qui se situe dans la chaîne de valeur d’une entreprise soumise au rapport de durabilité,
  • et qui a moins de 1000 salariés.

Conséquence en terme d’audit du rapport de durabilité

Le paquet omnibus n’introduit pas de changement substantiel concernant la certification des rapports de durabilité par un OTI ou un commissaire aux comptes. Ils devront toutefois s’assurer du respect du principe de “value chain cap” lorsqu’ils certifient l’information publiée par une entreprise. Les standards sur l’assurance limitée de l’information en matière de durabilité devront être adoptés par la Commission européenne via un acte délégué au plus tard le 1er juillet 2027. Les normes sur un niveau d’assurance raisonnable ne sont plus prévues.

La Commission mettra en place un portail dédié permettant aux entreprises d'accéder à des informations, des lignes directrices et des modèles concernant le cadre obligatoire et volontaire sur le reporting de durabilité. C’est une nouveauté introduite par le paquet omnibus.